Les massacres au nom de la religion sont nombreux dans l’histoire de France.

• Les guerres dites saintes. Le christianisme a fait de soi-disant guerres saintes aux Cathares, aux Albigeois, aux Vaudois. Des milliers de victimes. Durée: 1 siècle.
• L’Inquisition. Des papes ont institué l’Inquisition et la torture. Des dominicains ont été les inquisiteurs. Le christianisme a torturé et brûlé vif des milliers d’innocents. Durée: 6 siècles.
• La chasse aux sorcières. Le christianisme a torturé et brûlé vives environ 100 000 femmes. Durée: 2 siècles.
• Les guerres de religion. Les catholiques et les protestants se sont entretués par milliers, Durée: 2 siècles.

Le massacre de la st Barthélemy est d’une violence extrême à travers lequel le régime monarchique et la population de France a appris à se méfier des passions religieuses. Le comte de Toulouse connaît une semaine d’émeute sanglante entre les protestants et les catholiques. En 36 ans du massacre de Wassy à l’édit de Nantes, 8 guerres de religion.

Un vrai théâtre d’horreurs où le décor est dominé par les violences historiques d’acteurs de guerres religieuses.

Faut-il rappeler que durant la seconde guerre mondiale le clergé catholique n’a pas été protecteur pour les juifs, et a par contre protégé d’anciens nazis à l’issue de leur échec ?

http://atheisme.free.fr/Contributions/Catholique_nazisme.htm

En France, l’état et l’église s’associent par le baptême de Clovis au 5e siècle, le roi de France sera désormais intronisé par le Pape.

https://www.herodote.net/25_decembre_498-evenement-4981225.…

La bible de Chouraqui qui traduit de l’araméen le sermon sur la montagne  » heureux… » se traduit par « en marche », alors que la Bible la plus connue a choisi le mot « heureux ». Le contresens fabriqué fait que le chrétien a pu lire « sois heureux si tu es pauvre car dieu t’aime » au lieu de « lève-toi et tu auras à manger ».

De ce fait, dès l’association du pouvoir et de la religion cette dernière a servi les intérêts des puissants pour assurer la soumission des peuples et le rendre manipulable à sa guise. Cela ne retire pas aux croyants sincères l’authenticité de leur démarche intérieure, ni l’existence de personnes généreuses que l’histoire a retenu comme saint.e.s.

On parle de religion d’état. Le célibat des prêtres sert à enrichir l’église car leur héritage va au clergé. Les prêtres sont devenus des seigneurs. On dit bien,  » gras comme un moine » non ?

La persécution de la population pour motifs religieux vient au 11 em siècle et a perduré jusqu’à la révolution de 1789.

Durant des siècles, les religieux ont pourchassé tous ceux qu’ils estimaient ne pas croire correctement ou ne pas penser comme c’était commandé, les appelant « hérétiques ».
Après avoir exterminé les cathares, les templiers, les protestants, l’appareil de répression n’a plus de gens à torturer… Les prélats s’intéressent aux femmes et inventent le mythe de la sorcière tardivement, 15e siècle. 80% des victimes de l’inquisition sont des femmes veuves et célibataires qui auront été torturées quelques semaines à des mois avant d’être brûlées vives sans pouvoir parler de ce qu’on leur a fait subir. On devine facilement le mobile de ces enlèvements.

On trouve des représentations de femmes voilées au 15e siècle jusqu’au menton. Les religieux de l’époque exigeaient que les dames ne séduisent pas, qu’elles s’épilent les sourcils et jusqu’au sommet du crâne parce que le poil était vu comme attribut de démon, aussi bien que les pulsions sexuelles que les hommes pouvaient ressentir, dont les femmes étaient forcément coupables. Elles devaient aussi se couvrir les pieds. Si l’on voyait un peu de chair, alors c’est que la dame « faisait du pied » et donc, réclamait du sexe.

Il y eut un combat pour l’égalité des femmes qui a été de longue lutte du fait des abus du patriarcat. Le retour du voile donne l’impression d’une régression après avoir obtenu si peu.

On vous a raconté que la révolution française était contre le roi. En réalité, elle était un mouvement de révolte énorme contre la religion et ses abus millénaires. Les églises ont été profanées, les religieuses violées, les prêtres massacrés.
Les quelques tentatives de vivre ensemble promulguées comme l’édit de Nantes n’étaient pas respectueuses ni égalitaires, et n’ont pas tenu.

Après la révolution de 1789 il faudra plus d’un siècle encore pour que l’état et l’église divorcent vraiment. La loi de 1905 a forcé la religion à ne plus se mêler de l’état.
La République ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte.
Cela signifie que la république ne reconnaît pas un musulman d’un chrétien d’un juif ni d’un bouddhiste, ou d’un sikh. Les vêtements ne sont donc pas concernés par la première loi de séparation qui évite ce sujet.
Ne pas reconnaître, c’est aussi ne pas s’en préoccuper.
https://journals.openedition.org/assr/1119

Pour le vivre ensemble, on inventa la laïcité, mais une spécificité française et culturelle a émergé : ne parlons plus de la religion, ne la montrons plus, et on n’aura plus de guerre civile.

La religion est devenue privée, comme la sexualité, ainsi que le mettent en évidences certains posts (la religion c’est comme ton sexe tu ne la montre pas en public).

Voilà le prix de la liberté.
Les religions nous fichent enfin la paix !

Cette hostilité culturelle est souvent prise pour du racisme, et c’est compliqué car parfois, du racisme se cache aussi derrière.

Quelques années avant 2008, l’enquête de travailleurs sociaux a mis en évidence une pression religieuse sur les filles au sujet du voile confessionnel dans un collège de Creil . Une nouvelle loi s’est alors exprimée, réservée aux agents de l’état, et à toute l’enceinte des écoles primaires, secondaires, rejoignant le consensus culturel de discrétion religieuse. Pas de signes religieux à l’école primaire et secondaire. N’ont pas non plus le droit de mentionner leur orientation spirituelle tous les employés de l’état, des collectivités locales, territoriales qui, employés par tous les français, par un état neutre, se doivent aussi d’être neutres.

Au cours des siècles après la révolution et surtout ce dernier, les croyants chrétiens ont appris à pratiquer discrètement, au point que les autres pensent qu’ils n’ont plus de foi, alors que des indicateurs montrent au contraire un regain du nombre de croyants. N’étant que peu couverts médiatiquement, nul ne s’en rend compte.

On peut comprendre la réticence des gens du pays qui ont cette mémoire des massacres religieux et de plus de mille ans d’oppression d’avoir peur que cela revienne. Les peurs remontent d’autant plus grâce aux évènements bien couverts médiatiquement d’attentats liés à la religion, même si c’en est une autre.
La mémoire collective qui porte des siècles de persécutions a nourri une méfiance au sujet des religions en général, qu’on ne veut plus voir dans l’espace public. C’est associé à trop de sang, trop de larmes.

Pourtant, le consensus culturel est contraire à la loi. Il existe une confusion entre la culture et la loi de 1905 qui ne reconnaît donc aucun culte, afin que tous puissent pratiquer le leur même ouvertement : c’était le sens originel de la loi. Selon la loi, chacun s’habille comme ça lui chante. Selon le consensus culturel, on ne montre pas sa religion et les gens se disputent à cause de ces mentions opposées.

Vous qui ne comprenez pas cette hostilité, relisez l’histoire et vous ne verrez plus de racisme mais une légitimité de ce rejet nait d’une peur de nouvelle guerre.

Inconsciemment certain et certaines portent cette mémoire des abus horribles de la religion catholique. D’autres se souviennent et sont carrément hostiles à toute croyance, ainsi le journal Charlie Hebdo, pas plus anti musulman qu’anti chrétien.

Le voile musulman rappelle cette histoire douloureuse du pays ou le sang a coulé pour rompre entre la religion et l’état. Il inquiète les gens, qui ont peur que « ça recommence ».

Une renaissance du traumatisme dû a la mémoire collective sur les massacres que l’église a perpétué durant des siècles.
C’est la mémoire du sang qui parle. La mémoire des peuples dont celui de la France. Avant et après la révolution.

En 1927, une pièce de théâtre remet en scène un démon connu des juifs et chrétiens, donc musulmans aussi : Belphegor. On lui donne une apparence effrayante, tout de noir vêtu, couvert de la tête aux pieds. Certains malentendus culturels et cultuels peuvent choquer parfois, comme le mariage en blanc en occident qui est la couleur du deuil en Asie. La silhouette des femmes vêtues tout de noir de la tête aux pieds peut faire peur aux enfants, et aux gens du pays qui ont la culture chrétienne, rappeler ce démon. Le terme est passé dans le langage de gens racistes pour désigner les femmes portant l’habit islamique. Il faut que les gens sachent ce que parfois, à certaines personnes, cet habit peut évoquer.

https://mythologica.fr/demon/belphegor.htm

Pourtant, il n’existe pas de vérité uniforme, sœur Térèsa ou Latifa Ibn Ziater pourraient à elles seules nous le prouver.

La religion est aussi une source de spiritualité ou l’amour et la paix sont un but à atteindre.

Il y a eu, malgré tous ces massacres, des gens ordinaires, des gens de bien religieux, des hospices où les pauvres étaient soignés, des orphelinats pour élever les enfants abandonnés, des saints et des saintes comme St Yves en Bretagne, avocat et protecteur des pauvres, comme Ste Hildegarde qui a créé une encyclopédie de médecine, des chants magnifiques,

En fait, avec la peur, les gens du pays ont rejeté le bébé avec l’eau du bain, la spiritualité et le besoin de sacré avec tout ce cadre oppressant qu’on leur avait imposé.

D’autres pays n’ont pas cette réticence : la République du Sénégal est laïque par exemple, ne connaît aucune polémique sur le voile. L’histoire des religions ne lui a causé aucun traumatisme. Il faut dire que les communautés religieuses sont ouvertes entre elles : les musulmans invitent tous leurs voisins et amis quelles que soient leur confession aux fêtes musulmanes, les catholiques font de même, les familles sont mixtes et dansent ensemble.

Ce serait bien que chaque communauté comprenne où se situe la blessure de l’autre.  🙂

L’ignorance est la source de toutes nos peurs, aussi légitimes soient-elles.

On peut réaliser des avancées dans une communication laïque qui montre la fraternité unie entre les peuples au-delà des différences.

Jim Morrison dit de nous exposer à nos peurs les plus profondes pour qu’après cela, la peur ne pourra plus nous atteindre. Il faut apprendre à se connaître. Inviter ses voisins. Ouvrir l’entraide entre les gens au-delà des communautés.

Alors, pour que le voile ne soit plus source d’agression et de peur, libérons-nous ensemble fraternellement de cette mémoire voilée…

 

Katia Yakoubi

Merci à Alice Nguyen Cherbonnel pour les précisions historiques 🙂 . Elle a enseigné dans les prisons la laïcité et l’histoire des religions.